Pas de contrefaçon en présence de l’usage honnête d’une marque
Par un arrêt en date du 7 juillet 2017[1], la chambre commerciale de la Cour de cassation considère que l’utilisation d’une marque par un tiers sans autorisation pour désigner ses produits ne constitue pas des actes de contrefaçon, si cet usage est honnête et si le signe utilisé est indispensable à leur désignation.
Plus précisément, la Cour de cassation s’appuie sur l’article L.716-1 du code de la propriété intellectuelle interprété à la lumière de l’article 6, paragraphe 1 b), de la directive n° 89/ 104/ CEE du 21 décembre 1988, pour déclarer que :
« Le droit conféré par la marque ne permet pas à son titulaire d’interdire à un tiers l’usage, dans la vie des affaires, d’indications relatives à l’espèce, à la qualité, à la quantité, à la destination, à la valeur, à la provenance géographique, à l’époque de la production du produit ou de la prestation du service ou à d’autres caractéristiques de ceux-ci, pour autant que cet usage soit fait conformément aux usages honnêtes en matière industrielle ou commerciale ».
La Cour de cassation se fonde donc sur cette règle pour casser l’arrêt de la cour d’appel qui lui est soumis, lequel a accueilli une action en contrefaçon. La Cour affirme en effet qu’en sanctionnant l’utilisation sans autorisation par un tiers d’une marque pour désigner et vendre des produits identiques sans avoir recherché si ce dernier « n’avait pas fait un usage honnête d’un signe indispensable à la désignation du produit vendu », la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision.
De plus, la Cour de cassation considère dans ce même arrêt qu’un tel usage honnête doit être admis en matière industrielle et commerciale lorsque la marque utilisée sans autorisation était devenue usuelle pour désigner le produit proposé par le tiers.
Dans cet arrêt du 7 juillet 2017, la Cour de cassation ne définit donc pas précisément ce qu’est un usage honnête de marque en matière industrielle et commerciale permettant d’échapper à la qualification de contrefaçon de marque. L’application de cette exception sera par conséquent soumise à l’appréciation des juges, au cas par cas.
S’il n’existe pas encore de définition certaine de l’usage honnête d’une marque, la jurisprudence, et notamment celle de l’Union Européenne[2], a déjà présenté des exemples de ce qu’il n’est pas :
Ainsi l’usage n’est pas conforme aux usages honnêtes en matière industrielle ou commerciale lorsqu’il est fait d’une manière telle qu’elle peut donner l’impression qu’il existe un lien commercial entre le tiers et le titulaire de la marque, s’il affecte la valeur de la marque en tirant indûment profit de son caractère distinctif ou de sa renommée, s’il entraîne le discrédit ou le dénigrement de la marque, et si le tiers présente encore son produit comme une imitation ou une reproduction du produit revêtue de la marque dont il n’est pas titulaire.
Pauline PLANCQ
[1] Chambre commerciale de la Cour de cassation du 7 juillet 2017, N° de pourvoi 15-28114, publié au Bulletin.
[2] CJUE, 17 mars 2005, aff. C-228/03, The Gillette Company et a. c/ LA-Laboratories Ltd Oy : Rec. CJCE, I, p. 2337.